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D - Utilisation du bois

La qualité technologique de ce bois permet une utilisation privilégiée en bois dit ‘’d’usure’’. Aux 19 et 20ème siècle, c’est l’essence feuillue européenne la plus utilisée pour habiller les rabots et autres varlopes. Bien avant cette dernière, ce sont les dents d’alluchons des moulins (avant leur remplacement par le fer et la fonte), principale source d’énergie avant l’arrivée de l’électricité, qui garantissait à ses utilisateurs un fonctionnement correct pour des dizaines d’années de leur installation. L’industrie de la filature, en utilisait une quantité considérable pour notamment, confectionner des clavettes.

Un large spectre donc, sans oublier les loisirs et les traditionnelles ‘’boules de fort’’ dans l’Ouest de la France.

https://www.youtube.com/watch?v=VpEIoe74P18

Plus anecdotiquement, certains utilisent le cormier pour confectionner certaines pièces d’instruments de musique.

Les quelques privilégiés qui peuvent se procurer un plot de cormier (très faible volume disponible sur le marché; en France, c’est moins de 50 M3 qui sont ainsi proposé aux ventes -officielles- privées et publiques) correctement séché, peuvent faire ainsi de très beaux meubles, ou bien encore des portes intérieures ; mais dans tous les cas, c’est le savoir-faire de l’ébéniste qui sublimera le rendu final par le travail d’assemblage des différentes teintes de ce bois magnifique au toucher si doux.

12 - Bois

A fibre torse parfois, défaut courant semble t’il, qui pourrait s’expliquer par son irrésistible besoin de tendre vers la lumière (très héliophile). Pour l’industrie du tranchage, le défaut de la fibre torse ne nuit en rien. Par contre il rend plus difficile l’usinage de pièces. Certain pensent que ce défaut pourrait-être génétique et donc se transmettre (expérience en cours chez nous). Dans le cas contraire, une sylviculture volontairement conduite au profit du cormier devrait supprimer ce défaut.
Le cœur noir est un défaut courant en Bourgogne où une étude avait été menée dans les années 1995 (60% des individus atteints).Ces cormiers n’avaient subi aucune sylviculture à leur profit, on peut s’interroger sur un net recul du taux d’individus atteints s’ils avaient été conduits de façon dynamique (desserrage, mise en lumière).

Caractéristiques du bois :
Description du bois :
Bois parfaitement homogène, généralement très dur et lourd. Ce bois précieux rivalise à égalité avec le chêne vert ou bien encore le buis avec une masse volumique très importante (950 Kg/M3), on dénommait le bois de cormier ‘’l’ébène d’Europe au 18° siècle’’.

 

Son duramen est brun violacé, parfois clair, il fonce en s’oxydant. Ses maillures sont plus foncées que le reste du tissu.
Structure du bois :
Les accroissements annuels sont assez marqués. De même, des taches médullaires peuvent apparaître en limite de cernes. Leur présence reste cependant moins marquée que chez l’alisier torminal et l’alisier blanc. Les tissus fibreux sont abondants et forment parfois de petites plages tangentielles. C’est un bois qui est plus régulièrement maillé que les autres sorbus.

Pour aller plus loin…. :

Les trachéides du cormier (comme chez ses cousins les alisiers) peuvent jouer un rôle double: d’une part une fonction de soutien importante, d’autre part une fonction conductrice accessoire venant renforcer celle des vaisseaux et leur substituer éventuellement un système hydraulique plus sûr en cas de sécheresse (E.Sevrin, Suzanne Lachaud, A.Mansouri dans RFF 1993).

Les parois internes des vaisseaux sont revêtues de ‘’sculptures en hélice’’ plus ou moins développées ; ces structures, fréquentes chez les bois adaptés aux climats secs, faciliteraient l’adhésion aux molécules d’eau aux parois (Carlquist, 1988 dans RFF 1993).

Un arbre adapté à la sécheresse…. :

Quelle que soit la taille du cerne, la fréquence des vaisseaux est sensiblement la même entre les zones initiale et finale. Mais il est intéressant de constater que leur surface diminue beaucoup quand le cerne est large. Il semble donc que la zone cambiale fabrique des vaisseaux de plus en plus étroits au cours de la saison de végétation. Cela peut être considéré comme une adaptation à la sécheresse : en effet, l’arbre dispose de moins d’eau l’été. Diminuer la taille des vaisseaux va lui permettre d’augmenter la pression. La circulation de l’eau est meilleure, ce qui diminue également les risques d’embolie (E.Sevrin, Suzanne Lachaud, A.Mansouri dans RFF 1993).

La couleur du bois, un atout pour le (beau) meuble…:

Elle est variable et va de tons très clairs, aux différents rosés, en passant par des bois rouges (sujet âgé et bois de cœur) et des bois ondés. Cette variabilité s’explique pour partie par le régime forestier de la parcelle (sylviculture ou pas), aux différents types de sols et peut-être par l’origine génétique des individus.

Dans tous les cas, le séchage des plots doit être mené de façon prudente et le bois du cormier est d’une très grande qualité technologique.

Châssis d'un meuble à tiroirs en bois massif en cormier

Ou de belles portes ...

Une bibliothèque, détails...

Sa dureté et sa densité le qualifie pour des usages précis:

Exemple avec cette publication de l'atelier Sandrine RAFFIN, archetière et héritière du savoir-faire des Grands Maitres Archetiers français, maître artisan en métier d'art, entreprise du patrimoine vivant.

Dans le journal d'un atelier d'archèterie :http://www.atelier-raffin.com/

En 1833, dans le "Dictionnaire de l'Industrie manufacturière, commerciale et agricole" (Tome premier) l'ouvrage collectif apporte sa définition de l'archet dans un descriptif très intéressant.

On y octroie alors cinq parties distinctes : "la tête, la tige, la hausse ou chevalet, la vis de tension, le crin".
L'un des points les plus intéressants concerne le bois utilisable pour réaliser "la tige" (la baguette) :

"La tige se fait avec un bois dur, bien compact, bien sec; on prend ordinairement des bois exotiques, le bois de fer, le bois de Corail, le bois rose, le cormier des îles, etc. Dans les bois français le cormier et l’alisier, cœur, bien sec, pourraient aussi servir; mais on n’est pas dans l’usage de les employer..."

Le bois de cormier est parmi les plus durs bois indigènes en France. Il a longtemps été le plus prisé pour la confection des fûts d'outils de corroyage (rabots, rifflards, varlopes, guillaumes...), le pommier massif ou en semelle rapportée étant moins apprécié. Il fut aussi utilisé pour réaliser des outils de traçage, règles, trusquins, et de toise. Dans les moulins, les dents rapportées (alluchons) sur couronne en fonte de l'engrenage multiplicateur étaient faites en cormier. Il était aussi utilisé par les graveurs sur bois d'images (xylographie).

"Le bois des rabots". En effet, cette essence fut utilisée dans la fabrication de ces outils, à cause de sa densité (0.8 à 1.0), de son homogénéité et de son poli extraordinaire. On l'utilise en placage depuis très longtemps. On le trouve dès le XVII° siècle dans les marqueteries de fleurs. Son aspect le fait souvent confondre avec un poirier, mais il est bien plus gris. Les billes saines et non vissées sont rares, ce qui le limite à de petites dimensions à l'utilisation.

Nelly POIDEVIN, archetière française reconnue, a réalisé des essais d'essences de bois utilisés autrefois pour les archets médiévaux et  baroques. Le cormier s'adapte parfaitement à la fabrication de ces derniers...

Au début du 20 ème siècle, dans le catalogue du plus grand fabriquant d'outils d'Europe, la maison Goldenberg, en 1907, les clients avaient le choix pour les rabots et autres guillaumes par exemple, entre plusieurs essences de bois. Sur les pages ci-dessus une différence notoire saute aux yeux: hêtre ou charme pour l'entrée de gamme, fruitier, sans précision, pour la gamme intermédiaire et cormier ou chêne vert pour le haut de gamme.

Avant les chocolats Poulain, Guérin-Boutron joint à ses tablettes de chocolat des images chromolithographiques représentant personnages historiques ou de l’imaginaire populaire. Par souci de fidélisation, ces images sont publiées en petites séries. Avec Liebig, Aiguebelle ou Suchard, la marque Guérin-Boutron (fondée vers 1775) est parmi les plus actifs dans l'imagerie publicitaire. Ces chromolithographies ne sont pas destinées à être présentées en album. Sur celle-ci, c'est le cormier qui est à l'honneur. Un arbre portant fruits, et un détail en premier plan: un rameau cueillit avec fleurs et fruits. Un chasseur choisissant chez un armurier un nouveau fusil dont la crosse est visiblement faites en bois de cormier...